Il fut un temps où je parcourais les provinces chinoises pour des raisons professionnelles. Chargée de repérage pour des agences de voyage, j’avais la chance de découvrir des endroits méconnus du globe. Un de mes souvenirs les plus éberlués reste la rencontre des femmes Mosso. Cette ethnie selon mon cœur vit sur les rives d’un lac perché au centre de la Chine, entre le Yunnan et le Sichuan. Le décor est magnifique comme toute cette Asie montagneuse de l’intérieur que le touriste a tendance à négliger. Mais ma stupéfaction de l’époque est venue des mœurs et traditions de la population locale. Pensez donc, en ces années 70, une société où les femmes ont les pleins pouvoirs !
Chez les Mosso, le matriarcat est la règle, incontournable. La transmission des noms et des biens leur est réservée. On ne partage pas le patrimoine, il est transmis intact à une fille. La gestion des lieux, du travail et des activités nécessaires à la vie commune leur appartient. Le couple tel que nous le connaissons n’existe pas. La nuit, les hommes rejoignent les femmes qui le veulent bien. Les enfants sont confiés aux oncles maternels connus.

Une chose saute aux yeux dans un village Mosso : tout s’y passe sereinement. Pas de querelle, pas de jalousie, pas de problèmes matériels, l’envie de devenir riche ou plus puissant que le voisin n’existe pas ici. On se contente de ce qu’on a et on vit ensemble sans heurts.
Je ne sais ce que deviennent les Mosso aujourd’hui avec l’arrivée des écrans et d’internet, sans oublier les touristes que j’ai malheureusement, peut-être, contribué à attirer. Peut-être la tradition a-t-elle évolué. Mais avec le recul des années, je me suis souvent interrogée sur les dégâts de la société patriarcale qui nous a été imposée depuis des millénaires. Personnellement, je pense que le matriarcat pur est aussi excessif. Mais il faut bien avouer que les modes de fonctionnement de la femme dans la gestion d’une communauté sans contraintes ont du bon. À quand le réel partenariat ?